Crime, moralité et justice

Le genre du crime traite des thèmes de la justice et de la moralité. Il met généralement en scène un criminel qui transgresse la loi et un représentant de la loi qui tente de l’arrêter. Il repose sur l’idée que tous les individus sont égaux au sein de la société. Les lois et la morale sont donc nécessaires à la protection de cette égalité et au bon fonctionnement du système social.

Nous respectons les règles non seulement par éthique, mais aussi parce qu’elles garantissent que les autres les respecteront aussi. C’est le principe du contrat social.

Le conflit naît lorsqu’un individu veut atteindre son objectif sans respecter les règles, en les transgressant.

Ce genre est proche du thriller et du film de détective, qui eux aussi sont centrés sur la quête de vérité. Dans ces récits, le jugement ne survient qu’à la fin, lorsque la vérité éclate et que le coupable est arrêté. Le genre du crime, en revanche, s'intéresse davantage au conflit entre le criminel et l’homme de loi, posant la question de la moralité.

La moralité peut-elle exister en dehors de la justice 

Par exemple, Robin des Bois vole les riches pour donner aux pauvres. D’un point de vue légal, il est un criminel. Mais moralement, ses actions sont justifiées par son souci d’équité. Il défie donc la justice au nom de la morale.

Les «beats» classiques du genre du crime
Voici une structure narrative typique :

1. Un criminel se croit au-dessus des lois et commet un crime qui lui apporte pouvoir et argent.
2. Un policier, en apparence banal mais intelligent, comprend vite ce qui se passe et tente de l’arrêter.
3. Une confrontation s’engage entre les deux.
4. Chacun teste les limites de l’autre, jusqu’à l’affrontement final.

Le «story world» dans le genre du crime

Le premier élément à analyser est le monde dans lequel l’histoire se déroule.

Souvent, l’apparence de ce monde est trompeuse. En surface, tout semble fonctionner normalement, mais en grattant un peu, on découvre un système corrompu ou dysfonctionnel.

Deux types de mondes s'opposent :

• Le chaos total où les criminels font la loi (anarchie).
• L’état policier où les hommes de loi abusent du système pour leur propre intérêt.

Dans The Usual Suspects, on se situe clairement dans un état policier, et le film interroge comment on en arrive là… et s’il est possible d’en sortir.

La quête : Qui est Keyser Söze ?

Le film propose une enquête autour de l’identité de Keyser Söze : qui est-il ? Que veut-il ? Quelles sont ses valeurs ?

Voici une analyse basée sur des repères temporels et des éléments clés du récit.

Structure et analyse chronologique

00:05 – Verbal est interrogé. Il déclare ne rien craindre, car rien ne peut lui être reproché. Il suggère qu’il est peut-être à l’origine de toute l’histoire.

09:22 – Verbal dit que c’est la faute des policiers s’ils ont été mis ensemble.

11:54 – La police reproche à Keaton d’avoir simulé sa mort.

12:09 – Fenster évoque une injustice : même après avoir purgé sa peine, il reste persécuté.

15:56 – Keaton rejette toute proposition illégale : «You can all go to hell.»

16:42 – Verbal parle du code d’honneur des gangsters : ils ne trahissent jamais.

18:47 – Verbal est «protégé par le prince des ténèbres».

21:19 – Le survivant de l’incendie parle hongrois : «Le diable, c’est Keyser Söze.»

22:40 – Verbal demande un café : il gagne du temps et teste Kujan.

31:60 – Verbal promet à Keaton un coup «propre» et moral, sans violence.

42:15 – Verbal cache sa main blessée à Kujan, qui est trop énervé pour le remarquer.

47:50 – Dilemme moral : tuer ou non. Verbal tue à la place de Keaton.

59:25 – «The greatest trick the devil ever pulled was convincing the world he didn’t exist.»

1:00:13 – Des indices visuels renforcent l’idée que l’origine de Söze est une invention.

1:01:57 – Verbal dit que Keaton ne croit pas en Dieu, mais en a peur.

1:07:00 – Kujan pense savoir, donc il finit par croire ce qu’il veut.

1:16:00 – Keaton veut que Verbal reste pour prévenir Edie, pas par amour, mais pour qu’elle le venge.

1:34:00 – «Le genre d’homme capable de corrompre la volonté des autres.»

Keaton (protagoniste)

• Need : Abandonner son passé criminel pour devenir respectable.
• Désir : Réaliser un dernier coup pour se refaire.
• Fausse croyance : Il ne pourra jamais sortir de son rôle de criminel.

Verbal / Keyser Söze (antagoniste)

• Désir : Tuer l’homme qui peut l’incriminer, garder l’anonymat et continuer à corrompre le monde.
• Fausse croyance : Il n’a pas besoin de changer, car il est déjà “intouchable”.
• Argument moral : Une simple parole peut suffire à manipuler.

Agent Kujan

• Need : Accepter la réalité, même si elle ne correspond pas à ses attentes.
• Désir : Faire avouer que Keaton est Söze.
• Fausse croyance : Peu importe les moyens, seul le résultat compte.

Les 7 points structurels de Keaton (arc narratif)

• Need : Se ranger.
• Désir : Faire un dernier coup pour se «refaire».
• Antagoniste : Keyser Söze, qui lui rappelle une dette passée.
• Conflit : Il tente de rembourser sa dette mais découvre que Verbal est en réalité Söze.
• Révélation : Il réalise trop tard qu’il n’a pas vraiment changé.
• Climax : Keaton perd face à Söze.
• Nouvel équilibre : Söze triomphe et reste libre, Keaton est mort.

Conclusion / Message

Keyser Söze est le diable : il représente une figure capable de corrompre toute la société.

Message : Danser avec le diable mène à la mort de l’individu… et à celle de la société.